Un coeur sombre

R. J. Ellory, 2012

Après la très belle surprise de Seul le silence, il me tardait de retrouver la plume de R. J. Ellory. J’ai reçu celui-ci pour mon anniversaire, c’est son septième roman traduit en français et si j’avais lu le premier dans sa langue originale, je dois dire que la traduction est convaincante. Mais parlons plutôt de l’histoire.

Vincent Madigan a trois casquettes : il est flic, il travaille en collaboration avec le roi de la pègre et il s’apprête à lui voler une grosse somme d’argent. C’est l’anti-héros par excellence, il a raté sa vie sentimentale et met en danger sa carrière pour rembourser ses dettes, mais lorsqu’il se lance dans cette mission d’équilibriste où chaque faux-pas peut révéler au grand jour ses mensonges et lui coûter la vie, on ne peut s’empêcher de s’inquiéter pour lui.

Je ne te dirai rien de plus, cette histoire se déroule comme une immense partie de jeux d’échecs et je n’ai pas envie de t’en dévoiler trop. Une chose est sûre, c’est qu’il m’a tenue en haleine et que j’ai eu beaucoup de mal à le lâcher avant la fin. Niveau rythme, on est bien loin de Seul le Silence qui se déroulait sur des années : ici, tout est réglé en une petite semaine, et chaque chapitre apporte son lot de rebondissements. Ce n’est pas du tout dans ce registre que j’attendais Ellory, mais le talent est là et ce thriller est diablement efficace.

J’ai beaucoup apprécié le héros : malgré ses nombreuses erreurs de parcours et son air détaché, on sent qu’il a envie d’une vie meilleure et de remettre les compteurs à zéro. D’ailleurs, quand on jette un oeil à la biographie d’Ellory, on ne peut pas s’étonner que ses personnages soient torturés (je te laisse regarder par toi-même parce que c’est impossible à résumer, mais ça implique de l’orphelinat, de la prison, et pas mal de décès dans son entourage). Bref, j’ai passé un excellent moment avec ce livre, il est dynamique, haletant, et parfait pour se vider la tête.

Une autre belle surprise a été de découvrir que tous les titres de chapitre sont en réalité des chansons du groupe The Gun Club. Je ne l’ai pas compris tout de suite, car ils ne sont mentionnés nulle part (pas dans l’édition de Sonatine en tout cas), mais je me suis assez rapidement demandée pourquoi les titres étaient en anglais, et une petite recherche sur internet m’a donné la réponse. C’est un bel exercice de style, car chacun des morceaux a un rapport avec le contenu du chapitre. Parfois c’est un peu tiré par les cheveux et ça m’a fait sourire, comme dans « Watermelon man » qui parle subitement d’une anecdote liée à une pastèque, mais ça n’altère en aucun cas la cohérence et la fluidité du récit et c’est le genre de défis qui me font vraiment plaisir.

Du coup, tu t’en doutes, je te propose The Gun Club pour accompagner ta lecture. Je n’avais jamais entendu parler de ce groupe, qui a pourtant connu une belle notoriété si j’en crois mes recherches. D’ailleurs, les White Stripes ont repris certaines de leurs chansons pendant leurs concerts, et Noir Désir leur a rendu hommage dans sa chanson « Song for JLP ». Bref, il était grand temps que je les découvre et je te laisse avec une chanson qui me plaît tout particulièrement.