[Sélection / Un peu de maths?] Trois approches de romans sur les mathématiques

Dis donc, ça fait un bail qu’on n’a pas parlé maths par ici, non ? J’en suis d’ailleurs vraiment navrée : c’est vrai qu’avec mon rythme de vie un peu plus mouvementé que dans les débuts du blog, je mets la priorité sur les livres pour ne pas prendre trop de retard et je délaisse les sujets secondaires. Mais ça tombe bien, parce qu’aujourd’hui je peux faire d’une pierre deux coups et te parler de maths dans la littérature ! Trois angles d’attaque très différents pour que tu trouves ton bonheur, et trois lectures que je recommande vivement !

Cédric Villani – Théorème vivant (2012)

Il y a de bonnes chances que tu aies déjà entendu parler de Cédric Villani, ce mathématicien français un peu excentrique qui a reçu la médaille Fields en 2010. Dans Théorème vivant, il retrace les deux ans qui ont mené à la médaille, en une collection de pensées, d’e-mails, de bouts de preuves et de tous les aléas qui font l’excitation et la complexité de la recherche en maths.

Ce qu’il faut clarifier immédiatement, c’est que malgré les apparences, il n’y a pas besoin d’être bon en sciences pour apprécier cette lecture. Bien sûr, il parle un peu de son projet de recherche, mais c’est surtout un prétexte pour montrer le quotidien des mathématiciens théoriques, les culs-de-sac, les illuminations, les errances, et ce métier si particulier qui semble en-dehors de toute réalité. Pour tout te dire, je n’ai pas compris grand chose à la partie purement mathématique, et pourtant je me suis plongée dans cette collection d’instants avec grand plaisir.

Si tu t’es déjà demandé à quoi les théoriciens pouvaient bien occuper leurs journées, et à quel point les clichés des scientifiques sont fondés, tu devrais trouver ton compte dans ce petit livre qui se lit en quelques heures. Personnellement, j’ai vraiment aimé le voyage, et bien entendu cette ambiance me parlait puisque j’ai fait des études de maths, mais c’est également fascinant de découvrir les pensées et la routine d’un chercheur aussi connu que Cédric Villani. Il le dit lui-même, ce qu’il souhaitait surtout mettre en avant avec ce livre, c’est le fait que les mathématiques sont encore vivantes, qu’il reste tout un tas de choses à prouver et qu’elles ne sont pas figées, contrairement à ce qu’on pourrait penser. Pour moi, il a totalement rempli son objectif, et je t’encourage à te laisser porter à ton tour dans cette énergie et cette passion folles qui l’habitent !

Guillermo Martinez – Mathématique du crime (2004)

Résultat de recherche d'images pour "mathématique du crime martinez"J’ose imaginer que tout le monde n’a pas envie de lire un livre qui montre le quotidien d’un chercheur en maths et que tu pourrais être bien plus attiré par la fiction, et ça tombe bien, parce qu’on trouve aussi de beaux mélanges entre mathématiques et polar par exemple !

Guillermo Martinez, auteur et mathématicien argentin, a concocté une savoureuse course-poursuite entre deux scientifiques et un tueur en série qui laisse derrière lui des énigmes mathématiques en guise de jeu de piste.

Là aussi, pas d’inquiétude, on peut tout à fait apprécier la lecture sans avoir un doctorat dans le domaine. Bien sûr, j’ai savouré les dialogues entre les deux personnages principaux, qui rapprochent la logique mathématique de l’enquête policière, mais on ne tombe pas vraiment dans du vocabulaire technique ou des notions qui risquent de faire défaut au lecteur. La plume est très soignée et assez surprenante pour du polar, mais le crime n’est finalement pas l’élément central et on aime surtout suivre les pistes et s’imprégner de cette ambiance un peu désuète. Je n’ai pas vu l’adaptation cinématographique, mais je recommande cette lecture si tu t’intéresses aux deux univers et que tu cherches un polar qui sort des sentiers battus !

Yôko Ogawa – La formule préférée du professeur (2003)

Résultat de recherche d'images pour "la formule préférée du professeur"Et je termine avec mon préféré de cette sélection, un roman contemporain très doux et émouvant qui, sous prétexte de parler mathématiques, raconte la vie, la maladie et les rapports humains avec une poésie folle.

D’un côté, un grand mathématicien sur le déclin, qui perd la mémoire toutes les 80 minutes suite à un accident de voiture et qui a désormais besoin d’aide pour continuer à vivre seul. De l’autre, une aide-ménagère qui accepte le poste et ne connaît rien aux sciences mais déploie des trésors de patience pour s’occuper de lui. En filigrane, l’histoire de deux êtres qui s’apprivoisent, de partage et de profonde affection malgré les barrières de générations et de milieux sociaux.

Ca fait plusieurs années que j’ai lu ce roman, mais il m’a tant marquée que j’en ai des souvenirs très précis. Je me suis follement attachée aux différents personnages, à la plume de Yôko Ogawa et à cet amour des mathématiques qui se dégage du texte. Là aussi, bien entendu, aucun besoin de bagage particulier pour démarrer cette lecture, à l’image de la jeune femme qui entre pour la première fois chez ce mathématicien sans rien savoir de son monde. C’est une lecture très courte, mais qui frappe par sa tendresse infinie et la magie de cette atmosphère, comme un cocon qu’on voudrait ne jamais quitter. C’était aussi mon premier contact avec la littérature japonaise, moi qui n’avais pas encore découvert Murakami, et j’ai été fascinée par la simplicité et la puissance des scènes de vie dépeintes par Yôko Ogawa. Je te le recommande sans hésitation et peu importe ce que tu as l’habitude de lire, parce que je pense qu’il peut toucher un très large public.


J’aurais aussi pu te parler de José Carlos Somoza et de sa Théorie des cordes, qui touche plus à la physique (et que j’ai déjà chroniqué ici), ou du Démon des maths de Hans Magnus Enzensberger qui m’avait beaucoup plu étant petite, bien avant que je m’intéresse réellement à ce domaine, ou encore du Théorème du perroquet de Denis Guedj, qui est souvent cité mais qui m’a moins convaincu. Il y en a très certainement d’autres, qui m’attendent patiemment et que je ne manquerai pas de te présenter lorsqu’ils atterriront entre mes mains, tant ce mélange d’univers me plaît et me charme.

Et je termine sur du Bach, puisque je n’ai encore jamais utilisé ce joker dans mes chroniques et que s’il existe un compositeur fortement lié aux mathématiques, c’est bien lui. J’ai choisi son concerto pour violon en la mineur, en espérant que ça se marie bien avec la sélection que je viens de te faire.

21 commentaires sur “[Sélection / Un peu de maths?] Trois approches de romans sur les mathématiques

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  1. J’avais lu le livre de Cédric Villani et je dois avouer qu’il m’a un peu énervée… Disons qu’on sent un peu trop qu’il se regarde penser et que son ego n’est pas petit 😉
    J’avais beaucoup accroché sur Le Théorème du Perroquet, sans doute parce que c’était l’un des tous premiers à sortir et qu’il tombait pile en parallèle de mon cours d’histoire des maths… une synchronicité que j’avais trouvée amusante !

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  2. J’avais vu un reportage dans lequel Cédric Villani intervenait et son livre m’intrigue du coup…
    Mais j’avoue que celui de ta sélection qui me donne très envie est La formule préférée du professeur. De ce que tu en dis, je suis quasiment certaine d’aimer 🙂

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  3. Intéressant, le livre de Cédric Villani! Je l’ai lu il y a pas mal de temps, cependant.
    On pourrait aussi ajouter à ta liste « Oncle Petros et la conjoncture de Goldbach » d’Apostolos Doxiadis…

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          1. … plus de dix ans que je tiens mon blog – d’abord chez Over Blog, et à présent chez Blogger. Cela doit représenter plus de mille livres évoqués – j’ai un peu perdu le compte! Je suis un dinosaure de la blogosphère… 😉
            Bonne découverte du « Requiem pour une puce »!

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  4. «La formule préférée du professeur » a l’air très beau et me tente beaucoup 😊 J’aime énormément la délicatesse avec laquelle les auteurs Japonais dépeignent les sentiments et la vie comme elle va 😊

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  5. Les maths, c’est ma bête noire depuis l’école! Mais je ne leur en veux pas et je pourrais me laisser tenter par le livre de Cédric Villani, plus pour l’aspect « recherche » en général que pour l’aspect maths en particulier, ou le roman policier. Je suis assez familière des parallèles qu’on peut faire entre enquête policière et analyse littéraire, mais les maths? Ca m’intéresse de découvrir!

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    1. Oh ce serait super que tu tentes un de ces livres en n’étant pas très attirée par les maths à la base 🙂 Je suis tout à fait d’accord que dans le cadre scolaire, les maths sont souvent mal amenées et pas vraiment mises en valeur !

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