[Sélection] Trois huis-clos captivants

Novembre, la grisaille, l’envie irrésistible de se plonger dans des romans impossibles à lâcher pour végéter sur son canapé pendant des heures… Bref, le moment idéal pour te proposer quelques lectures oppressantes, resserrées, en comité restreint, et que tu risques bien de dévorer (du moins, je l’espère !). Trois ambiances différentes toutefois, il devrait y en avoir pour tous les goûts.


Sandrine Collette – Des noeuds d’acier (2013)

Tu te souviens peut-être des Larmes noires sur la Terre que j’avais lu pour le Prix du Polar du Livre de Poche et qui m’avait tant marqué. Depuis, j’avais décidé de suivre de près Sandrine Collette, et c’est donc tout naturellement que j’ai sauté sur l’occasion de retrouver sa plume avec Des nœuds d’acier.

Dans ce très court roman, on accompagne Théo Béranger à sa sortie de prison. Un an et demi de captivité, de longs mois qui l’ont transformé et désormais une idée fixe : se venger de son frère malgré les risques de retourner au clou. Théo se retrouve ainsi au fin fond de la campagne, pour quelques jours d’oubli avant de reprendre contact avec ses proches. Mais quelques mauvaises rencontres pourraient bien prolonger son séjour…

Sandrine Collette n’a pas besoin d’écrire des pavés pour créer une atmosphère étouffante, des personnages crédibles et un suspense diabolique. On plonge dans ce livre sans se méfier et on en ressort en apnée, quelques heures plus tard, avec des images gravées à jamais dans la rétine. Le récit est d’une noirceur folle, du genre qui fait perdre foi en la nature humaine, mais il ne tombe jamais dans l’improbable ou dans la surenchère. Une plume cruelle et impitoyable, qui rend avec beaucoup de réalisme la crasse des sous-sols, la souffrance de Théo et la noirceur de l’âme de ses bourreaux. Un huis-clos de grande qualité, étouffant et percutant, que je recommande sans hésitation si tu as l’estomac bien accroché !


Dan Simmons – Terreur (2007)

Je n’aurais jamais dû attendre aussi longtemps avant de te parler de Terreur, honte à moi. Dan Simmons est un incontournable de la littérature imaginaire anglophone, et la petite brique qu’il a sorti il y a dix ans m’a fascinée de bout en bout. Je l’ai lu il y a plus de six mois, mais mes souvenirs sont toujours aussi vifs !

Terreur réécrit l’histoire du HMS Erebus et du HMS Terror, deux bateaux de la flotte britannique qui partirent explorer l’Arctique en 1845. Une expédition mythique qui n’a fait aucun survivant, après plusieurs mois d’agonie et un équipage entier piégé par les glaces…

La bibliographie suffit à prouver l’ampleur des recherches menées par Dan Simmons pour se rapprocher des faits historiques. Le récit est en effet très documenté, et j’ai personnellement appris un tas de choses sur cet épisode de l’Histoire que je ne connaissais même pas. Mais pour pimenter encore la narration, il s’est amusé à y mêler du fantastique, par petites touches oppressantes, pour combler les lacunes qui nous restent encore dans cette expédition bien mystérieuse. Le danger s’incarne en un monstre de glace, qui les traque de loin et semble jouer avec eux, et le huis-clos prend des dimensions gigantesques puisque leur prison s’étend à perte de vue, désert gelé qui exploite leur moindre vulnérabilité.

Ce mélange de véracité historique et de fantastique fonctionne à merveille et rajoute ce qu’il fallait d’action pour en faire un véritable page-turner. J’ai adoré suivre les personnages et espérer de toutes mes forces qu’ils s’en sortent, observer les mutineries, les doutes, les frayeurs, les plans de plus en plus désespérés pour se sortir de cet enfer de glace, et sentir l’ombre de cette présence menaçante dans chaque angle mort et dans chaque reflet… Une merveille si tu aimes les pavés, et une ambiance idéale pour l’hiver !


Jean Hegland – Dans la forêt (1996)

C’est bien connu, les éditions Gallmeister font un merveilleux travail de mise en avant de pépites anglophones, et chacune des couvertures me donne envie de craquer (et après je renonce parce que je préférerais découvrir ces romans en VO, mais c’est une autre question). En l’occurrence, ils ont jeté leur dévolu sur un texte qui a désormais plus de vingt ans, qui n’a pas pris une ride et qui fait enfin une entrée fracassante en francophonie !

Nell et Eva vivent en quasi autarcie dans leur grande maison depuis que le monde vacille. Plongées dans la forêt, elles se débrouillent comme elles peuvent pour subsister et entretenir leur foyer en attendant que tout se remette en marche et que leurs vies d’avant reprennent leur cours. L’une s’entraîne tous les jours pour concrétiser une carrière de danseuse, l’autre lit l’encyclopédie pour réussir son entrée à Harvard, et elles entretiennent ensemble une illusion de crise temporaire, un espoir que tout revienne rapidement à la normale.

C’est donc encore un autre genre de huis-clos, plus contemplatif et paisible en apparence, mais qui s’étoffe et s’épaissit au fur et à mesure qu’elles réalisent la précarité de leur situation. Un roman douloureux sur une fin du monde aussi glaçante que crédible, puisqu’elle s’installe insidieusement et sans faire de vague. J’ai mis quelques dizaines de pages à entrer vraiment dans l’histoire mais je retiens certaines scènes particulièrement fortes, un profond souffle de vie et une bouffée d’air frais qui donne des élans d’évasion, de retour à la nature et d’amour fraternel. Un texte lent mais très beau, dont on s’imprègne doucement et qui marque sans en avoir l’air.


Trois angles d’approche très différents du huis-clos, entre passé, présent et futur, trois plumes marquantes et trois ambiances uniques que je te recommande chaudement. Tu les as lus ?

10 commentaires sur “[Sélection] Trois huis-clos captivants

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  1. C’est une bonne idée, ce regroupement de titres autour d’une même thématique. J’ai lu les titres de Collette et Hegland. J’avais apprécié l’efficacité du premier, sans qu’il me donne pour autant envie de revenir vers cette auteure, et adoré le deuxième, la manière dont Jean Hegland dépeint la relation entre les 2 soeurs est très touchante.

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    1. J’avais déjà aimé la plume de Collette dans « Les larmes noires sur la terre », j’étais très contente de la découvrir dans un autre texte 🙂
      On est d’accord, l’écriture des personnages de « Dans la forêt » est très maîtrisée !

      J’aime

  2. Sandrine Colette est totalement à découvrir pour moi, et j’ai Terreur sur ma liste à lire, je suis très curieuse de voir la réécriture de cet aspect historique à la façon thriller horrifique ! (d’autant que j’avais commencé à regarder la série adaptée). Tu me donnes très envie de les lire !! Et d’ailleurs ton choix de thématique pour les regrouper est très intéressant.
    Pour Dans la forêt, je l’ai fini ce matin, et j’en garde des images et une narration très puissante. La fin du monde est crédible, lente, et fait revenir l’humanité à un sacré état primitif ! Je n’aimerais pas y être. Mais la relation et la psychologie des deux soeurs est superbe, et la narration a un vrai charme. Je suis entrée dedans sans peine, envoûtée ! Sans oublier tous ces passages sur la nature, qui donnent l’impression d’être dans cette forêt.

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    1. Oh génial, je me réjouis d’avoir ton retour sur Terreur ! Je ne savais même pas qu’il y avait une série 🙂
      On est totalement en phase pour Dans la forêt, ça m’a donné une telle bouffée d’air frais après m’avoir plongée dans une déprime sans fond… Une sacrée expérience de lecture.

      Aimé par 1 personne

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